La chasse au “gaspi” dans les centres de données est ouverte. Ces immenses salles, appelées aussi “data centers”, composées de multiples serveurs informatiques qui stockent les informations nécessaires aux activités des entreprises, sont devenues de véritables gouffres énergétiques.

Selon une étude menée par des chercheurs européens dans le cadre du programme de l’Union européenne “Energie intelligente – Europe”, les 7 millions de centres de données recensés dans les pays de l’Union européenne consommeraient, chaque année, 40 milliards de kilowattheures, soit l’équivalent de l’énergie utilisée annuellement par une grande agglomération française pour son éclairage public. Si rien n’est fait, cette consommation électrique pourrait, d’ici à 2011, augmenter de 110 % par rapport à 2006, estime l’enquête qui sera complétée au printemps par des études de cas en entreprises.

“Dans les prochaines années, la croissance des nouveaux data centers sera faramineuse. Si on ne prend pas des mesures maintenant, on va dans le mur !” s’alarme Alain Anglade, chercheur au sein de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et membre de l’équipe de chercheurs. Encore modeste à l’échelle de l’Hexagone, l’énergie utilisée par les centres de données (4 à 6 milliards de kilowattheures) représente 1 % de la consommation d’électricité du pays. Un pourcentage appelé à croître rapidement en raison de la diffusion rapide des nouvelles technologies informatiques. Les banques, par exemple, soumises à des réglementations croissantes en termes de stockage et traitements de leurs données informatiques, sont déjà contraintes d’agrandir leurs centres de données.

Le gouvernement français a saisi l’occasion du plan France numérique 2012, lancé en octobre 2008, par le secrétariat d’Etat au développement de l’économie numérique pour créer un observatoire des centres de données. A horizon de dix-huit mois environ, il permettra aux entreprises de se comparer entre elles et de les aider à prendre des mesures pour qu’elles diminuent la consommation énergétique de leurs machines, explique en substance Alain Anglade, un des responsables du projet pour qui “les entreprises sont déjà sensibilisées car ce gaspillage commence à leur coûter beaucoup d’argent”. Cette mise en commun devrait également permettre aux entreprises d’anticiper sur la création de nouvelles normes environnementales plus contraignantes au niveau européen.

Parallèlement, le ministère de l’économie et des finances vient de lancer un groupe de réflexion. Baptisé “Green ITW” et dirigé par Michel Petit, membre de l’Académie des sciences, il doit proposer, d’ici à mai, des solutions pour une “utilisation éco-responsable” des centres de données. En clair, comment faire des économies d’énergie sans pénaliser les entreprises dans l’utilisation de leurs outils informatiques. Selon l’étude européenne déjà citée, près de 12 milliards d’euros pourraient être économisés grâce à de nouveaux équipements moins gourmands en électricité et des techniques plus efficaces de ventilation des salles.

L’Allemagne a, de son côté, déjà entrepris de lutter contre le gaspillage énergétique des “data centers”. Depuis l’été dernier, un guide est à disposition des entreprises pour leur faire prendre conscience du problème et les pousser à investir dans des équipements plus efficaces. Bien décidé à montrer l’exemple, le ministère fédéral de l’environnement a annoncé en novembre 2008 avoir baissé la consommation d’électricité de ses propres serveurs de 60 %, soit une économie de CO2 de 44 tonnes.

Particulièrement concernés, les géants de l’informatique cherchent eux aussi déjà à réduire la facture énergétique de leurs data centers devenus gigantesques pour stocker e-mails, vidéos et autres documents disponibles en un seul clic. Récemment, Google, Yahoo ! ou encore Microsoft ont installé certains de leurs sites informatiques sur les bords de grands cours d’eau américains. Ils souhaitent pouvoir refroidir plus facilement leurs machines et utiliser les centrales hydrauliques proches pouvant leur fournir de l’électricité moins chère.

Jouant la carte du développement durable, Google affirme avoir investi 45 millions de dollars dans les énergies renouvelables. Le mastodonte américain a même déposé un brevet pour pouvoir installer des centres informatiques alimentés par l’énergie des vagues et refroidis par l’eau de mer sur des plates-formes flottantes.

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